Audrey LABONTE

Audrey LABONTE

“ Fonctions des interactions plantes-pollinisateurs à différentes échelles écologiques : implications pour la reproduction des plantes sauvages en contexte agricole ”

Résumé

L'intensification agricole et l'homogénéisation des paysages ont entraîné un déclin massif des plantes sauvages et des pollinisateurs. Or, la pollinisation est indispensable pour la production agricole et le fonctionnement des écosystèmes. Les zones herbacées linéaires non cultivées (bandes fleuries ou enherbées, bordures de champs) peuvent contribuer à la conservation des plantes sauvages, des pollinisateurs et des systèmes de pollinisation. Pour être efficaces à long terme, ces infrastructures doivent soutenir des systèmes fonctionnels de pollinisation permettant le flux de gènes et la reproduction des plantes sauvages, afin d'assurer le maintien du soutien aux pollinisateurs et des autres services fournis par ces plantes dans des milieux agricoles fluctuants. Cependant, la capacité de ces infrastructures linéaires herbacées à soutenir la pollinisation et la reproduction des plantes sauvages est encore mal connue. Basée sur deux expérimentations de terrain, l'une à l'échelle d'une ferme agroécologique et l'autre du paysage, cette thèse étudie comment la composition et la topologie des systèmes d'interactions plantes-pollinisateurs opérant à différents niveaux d'organisation écologique dans le paysage agricole (l'individu végétal, l'assemblage plantes-pollinisateurs local, le réseau d'interactions des infrastructures herbacées linéaires à travers le site, et la structure du paysage agricole en termes de composition et configuration des habitats favorables aux pollinisateurs) affectent la reproduction de plantes sauvages (Cyanus segetum, Centaurea jacea [Asteraceae]) transplantées dans des infrastructures linéaires herbacées. La thèse applique une approche analytique originale centrée sur l'individu végétal en restreignant les données à sa période de floraison pour étudier les effets des systèmes d'interactions plantes-pollinisateurs multi-échelles sur la reproduction individuelle en termes de quantité (nombre de graines) que de qualité (diversité génétique). Les modèles corrélatifs (LM/GLM/GLMM) montrent que le nombre de graines, la diversité des contributions paternelles et la diversité génétique de la descendance des plantes sauvages dans ces infrastructures sont influencés par les variations spatio-temporelles (liées à la phénologie individuelle et à la gestion agricole) de la composition des assemblages plantes-pollinisateurs opérant aux échelles de l'individu à la communauté, avec des résultats parfois contradictoires pour la production de graines et la qualité génétique de la descendance, et donc des implications différentes pour le maintien des populations. La contribution de différents groupes fonctionnels de pollinisateurs au flux de gènes des plantes dépend de leur abondance et de traits (pilosité, mobilité, constance florale) favorisant l'efficacité pour le transfert de pollen conspécifique. La topologie du réseau d'interactions des infrastructures herbacées à travers le site (ferme ou paysage) affecte aussi la production de graines. De plus, la composition et la topologie des assemblages mutualistes interagissent à travers les échelles écologiques pour moduler l'efficacité des pollinisateurs et la reproduction des plantes, soulignant la complexité et l'imbrication des interactions biotiques. Notamment, la structure du paysage agricole modifie l'effet sur le nombre de graines des assemblages et interactions opérant aux échelles locale et du site. La reproduction des plantes sauvages est facilitée par la présence de cultures fleuries à proximité, mais diminue globalement avec la richesse et la proximité des habitats semi-naturels. Les résultats obtenus indiquent que les infrastructures agroécologiques et les bordures de champs soutiennent des réseaux de pollinisation capables d'assurer le flux de gènes des plantes et la production de graines.

Thèse soutenue le 12 juin 2023